Politique d’achat d’outils : un incontournable pour diminuer le bruit en atelier

25 août 2025

Par Marianne Laforte, conseillère en hygiène industrielle

Politique d’achat d’outils : un incontournable pour diminuer le bruit en atelier

(AUTO PRÉVENTION)

Savez-vous que vous avez l’obligation de réduire l’exposition au bruit dans votre milieu de travail ?

En effet, c’est une obligation légale pour toutes les situations de travail à risque de dépasser la valeur limite d’exposition. Le Règlement sur la santé et la sécurité du travail (RSST) requiert que vous mettiez en place un plan d’action sur 5 ans. Le premier cycle a débuté lors de l’entrée en vigueur de la réglementation en juin 2023.

Pourquoi une politique d’achat est-elle essentielle ?

Dans le secteur des services automobiles, l’exposition au bruit provient principalement des outils. Afin d’améliorer significativement l’ambiance sonore de votre atelier, il est important de travailler sur la réduction à la source. Pour ce faire, s’attaquer aux outils les plus bruyants est la stratégie la plus efficace.

Nous avons réalisé un exercice de modélisation avec la dosimétrie (mesure de l’exposition au bruit) qui couvrait la journée entière d’un technicien en mécanique. S’il avait utilisé une clé à chocs moins bruyante de 5 dBA, son exposition pour la journée aurait été réduite de 42 %. C’est considérable !

Le défi peut s’avérer important, si l’on considère que les outils appartiennent aux travailleurs, tandis que la responsabilité de réduire l’exposition au bruit, elle, revient aux employeurs.

Vidéo Impacts art septembre
(VIDÉO : AUTO PRÉVENTION)

Pour répondre à cette obligation légale, Auto Prévention recommande de mettre en place une politique d’achat d’outils à niveau de bruit réduit.

Comment choisir un outil moins bruyant ?

Le remplacement d’outils pneumatiques par des outils électriques est-il la solution ?

Pas forcément. C’est beaucoup plus complexe. La stratégie de réduction du bruit est différente en fonction de la source de bruit prédominante de l’outil, il n’y a pas de « recette toute faite » pouvant être appliquée à tous les outils.

Recette

Le document de spécification technique et les sites web des manufacturiers sont votre première source d’information. Il faut porter attention à un certain nombre de choses si l’on veut comparer des pommes avec des pommes.

Y parle-t-on de pression ou de puissance acoustique ? Les deux sont exprimées en dBA, mais ne sont pas équivalentes. La puissance correspond à l’énergie acoustique émise par l’outil et la pression est ce que le travailleur ressent à son oreille. Dans ce second cas, la distance entre l’outil et les oreilles du travailleur entre en ligne de compte.
Les valeurs publiées ont-elles été mesurées « sous charge » (pendant que l’outil travaille) ou pas (l’outil tourne à vide) ?
Selon quels protocoles les valeurs publiées ont-elles été mesurées ?

Pour vous soutenir dans l’analyse des différents modèles d’un même outil afin de choisir une option à niveau de bruit réduit, nous avons développé une grille d’analyse comparative. Cette grille inclut les informations pertinentes pour orienter votre choix en fonction des documents des manufacturiers.

L’exemple révélateur de la clé à chocs

La clé à chocs, plus connue sous son nom anglais « impact » ou « impact gun » constitue un exemple d’outil qui nécessite une évaluation plus fine.

Selon le rapport publié par l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et sécurité du travail (R-554), lorsqu’une clé à chocs pneumatique tourne à vide (sans charge), la source prédominante de bruit est la sortie d’air. Par contre, lorsqu’elle est utilisée sous charge, la source prédominante de bruit est le mécanisme de masselottes, soit les marteaux à l’intérieur qui génèrent les impacts.

Certains avancent que les clés à choc à batterie sont moins bruyantes. Ce n’est malheureusement pas ce qu’ont démontré nos mesures sur le terrain. Lors de l’analyse du mécanisme de fonctionnement de ce type de clés à chocs, nous avons pu en comprendre la raison : le mécanisme de masselottes frappe deux fois par tour dans les clés à choc à batterie, contre seulement une seule fois par tour pour un outil pneumatique.

En plus d’être au moins aussi bruyantes que les clés à chocs pneumatique, les clés à chocs à batterie sont beaucoup plus lourdes et leur centre de gravité est décentré par rapport au poignet de l’utilisateur. Cet effort supplémentaire sur le poignet et le coude constitue un facteur de risques supplémentaire pour le développement de troubles musculosquelettiques (TMS).

(AUTO PRÉVENTION)

Ne pas négliger les vibrations : un enjeu de santé méconnu

Nous vous invitons à prendre en considération les vibrations émises par les outils évalués dans votre grille comparative, afin de ne pas générer un autre problème de santé pour les travailleurs. Les vibrations sont un facteur aggravant pour le risque de développer un TMS. Bonne nouvelle, les outils moins bruyants sont souvent aussi moins vibrants !

Un investissement rentable

En mettant en place dès maintenant une politique d’achat d’outils à niveau de bruit réduit, vous ne faites pas que vous conformer au niveau légal : vous investissez dans la santé globale des travailleurs. Cela entraînera des répercussions sur la fatigue, le niveau de stress et le confort à long terme. Cette démarche peut contribuer à réduire les coûts liés à l’absentéisme en milieu de travail. Ce faisant, vous démontrerez un leadership concret en matière de santé et sécurité.

D’ici là, sachez que le port de protection auditive est requis pour les travaux à risque de dépassement, et ce dès à présent. Et qui dit protecteurs auditifs dit formation !